Cinquième partie

Adèle resta assise sur le lit, jetant un regard de travers à son assiette. Son estomac lui criait de manger mais sans esprit, lui, voulait qu'elle cesse de penser à tout et n'importe quoi. La jeune femme haussa les épaules à la remarque de Jack, les traits légèrement plissés. Elle releva les yeux et lâcha finalement un petit sourire. Ce petit sourire.

« - Non, je pense qu'une douche serait plus emprunte à me revigorer » fit-elle en se tournant légèrement vers lui.

A vrai dire, elle aurait bien aimé s'asseoir en tailleur, mais pour cela il aurait fallu que sa jambe ne soit pas enfermée dans cette attèle, et surtout, qu'elle la plie elle même, puisque celle-ci ne semblait plus lui obéir. Elle se contenta donc d'être tournée vers lui, décalant son assiette vers lui.

« - Tu peux finir si tu veux »

A vrai dire, elle ne sentait pas finir son assiette, même peut-être après s'être débarrassée de cataplasmes du Terrien. Et puis après tout, si elle avait réellement faim, elle pourrait toujours demander à l'homme quelque chose en plus non ? Elle crevait la dalle, elle ne pouvait se refuser de l'admettre. Mais peut-être que ces nombreuses journées à ne manger qu'une pomme avaient forgé son estomac. La petite brune lâcha un petit soupir avant de relever la tête vers Jack, ne se doutant pas qu'il était encore en train de se battre avec lui même dans son esprit. Si elle l'avait su. Elle se décala légèrement du lit pour se mettre debout, faisant le tour de celui-ci pour arriver au niveau de Jack.

« - Je sais que tu vas me traiter de petite mamie mais ... Tu veux pas m'aider à trouver une canne ? »

La jeune femme avait parlé sur le ton de la plaisanterie, espérant convaincre Jack, et elle même par la même occasion, que ce n'était pas si grave. Elle retrouvait sa jambe, il fallait juste s'en convaincre. Et actuellement, il lui fallait réellement cette canne, si elle voulait arriver ne serait-ce qu'à se déplacer un peu.

Il avait courut presque tout le temps du trajet, et avait tout de même pris soin d'appeler deux autres gardes situés aux étages d'en dessous. Il ne savait pas pourquoi, mais il avait un très mauvais pressentiment. Et celui se confirma lorsque, tandis qu'il était presque en haut, il reçut un messages dans son talkie-walkie.

« - Stephen au rapport. Détérioration du matériel en salle des turbines. La porte est verrouillée et je ne peux plus l'ouvrir.
- Dépêchez vous de monter ! C'est sûrement elle qui a du s'arranger pour que personne ne puisse la suivre. Activez vous et appelez des renforts, il ne faut surtout pas qu'elle ouvre cette porte, vous savez tous la dangerosité que pourrait provoquer une brèche dans le système. »

Il accéléra sa course après avoir délivré ses ordres et arriva en haut en moins de deux. C'est la qu'il la vit, se dirigeant vers le levier pour ouvrir la porte de sortie de secours. Il sortit alors rapidement son arme et la pointa vers elle. Il avait plusieurs raisons de l'abattre : tout d'abord, elle était trop sauvage. Ensuite, si elle ouvrait cette porte, il allait mourir dans les quelques instants suivants et surtout, ceci se répercuterait sur de nombreux étages. Il accéléra le pas pour arriver presque à son niveau, ne se souciant plus de se cacher. Au contraire, il fallait qu'elle le voit.

« - Stop ! Lâchez toute ce levier ! Vous ne savez pas ce qui est jeu ! Lâchez ce levier ou je vous exécute sur le champ ! Les mains sur la tête ! »

Il remonta son arme, la pointant sur la tête de la jeune femme, les doigts crispés sur la gâchette. Et comme pour appuyer ses paroles, des gardes débarquèrent des deux côtés de la salle.

« - Si vous tentez un seul mouvement, nous serons forcés de vous arrêtez. S'il vous plait, lâchez ce levier, il en va de notre survie. »

Et il était clair que si elle ne faisait qu'un seul mouvement, Billie finirait en passoire.

Finir l'assiette de la jeune femme ? Il aurait adoré, mais clairement, il fallait qu'elle mange. Alors, même s'il en mourrait certainement d'envie, le brun secoua la tête en levant les yeux au ciel, alors qu'elle lui lançait son petit sourire qu'il aimait tant et dont il avait été privé durant assez longtemps pour ne serait-ce que songer à l'ignorer et à éviter de la regarder.

« - Non ça va aller, je ne voudrais pas que tu tombe dans deux minutes. »

Il esquissa un petit sourire, pendant que la brune faisait le tour du lit maladroitement, pour venir se placer juste devant lui, qui était resté assis le dos contre le mur. Durant un bref instant, le brun posa son regard sur la jambe bleuâtre de la brune, et ses affreuses pensées revinrent dans son esprit. Ta faute, c'est ta faute. Entièrement ta faute. Mais ce qu'elle lui dit vint le tirer de là, et sa plaisanterie, accompagnée de son sourire, firent à son tour sourire le jeune homme, qui passa ses jambes par-dessus le bord du lit pour lever la tête vers Adèle. Un sourire espiègle apparut sur les lèvres du brun, un demi-sourire tordu qui serait désormais la norme chez lui.

« - Eh bien j'ai envie de dire que la petite mamie n'est pas encore totalement décrépie ... »

Il passa alors un bras autour de la taille de la brune, sans se lever encore, et se servit d'elle pour se debout, et, c'est sans lâcher son sourire en coin qu'il finit par baisser la tête vers elle, comme s'il allait l'embrasser, avant de se reculer d'un pas, toujours aussi joueur.

« - Mais tu reste une mamie, après tout. »

Ses mains fraîches lâchèrent la brune, tandis que les pensées entêtantes revenaient. Ta faute, Jack, tout est ta faute ... Mais, évidemment, il ne pouvait pas la laisser comme ça, sans sa canne. Alors, avec son air espiègle, Jack se détourna pour chercher quelque chose du regard, et il remarqua le bâton qu'il avait attrapé pour faire face au Terrien. Il alla le chercher, et le ramena à la brune en arquant un sourcil - le gauche, celui qui n'avait pas été touché.

« - Ca irait, mamie ? »

Adèle le regarda hésiter durant suelques instants, tandis qu'il regardait son assiette. Il crevait la dalle, elle le savait, tout comme elle. Sauf qu'elle pouvait se priver, ne serait-ce qu'un peu, et lui pourrait en profiter pour manger un peu plus, il en avait besoin après tout, et sûrement plus qu'elle, qui était habituee a manger peu. Elle lui adressa donc un autre petit sourire, haussant une fois de plus les épaules, debout devant lui.

« - Je ne m'écroulerai pas, t'inquiète pas pour moi. »

La jeune femme lâcha un petit sourire face à sa deuxième remarque, se souvenant seulement maintenant qu'ils etaient tous les deux tout justes vêtus de simples sous vêtements rudimentaire. Ce qui lui poussait à croire qu'il était peut être en train de la reluquer, ou simplement qu'il essayait lui aussi se faire passer ses sombres pensées par la plaisanterie, ce qui lui semblait normal.

« - Je ne peux pas en dire autant du papi ... »

Elle dut bosser sur ses appuis et sur abdos restant pour ne basculer en avant lorsque Jack se servit d'elle pour se relever, passant un bras autour de sa taille. Cette petite scènette lui arracha un léger rire, qui résonna dans la grotte, et elle dut avouer que rire lui avait aussi manqué. La brunette ne bougea pas d'un poil lorsqu'il se pencha vers elle, sentant durant quelques instants son visage très proche du sien. Elle crut durant quelques instants qu'il allait l'embrasser à nouveau, mais il se recula, lui jetant encore une plaisanterie a la tête. Et elle n'en démordit pas, gardant toujours son sourire, oubliant durant quelques instants l'enfer qu'ils avaient passé depuis des jours.
Elle accepta avec toute bonté le bâton qui lui tendait Jack et s'appuya dessus, soupirant de soulagement. C'était assez désagréable de tenir debout comme ca. Elle se remit rapidement droite avant de regarder la sortie de leur chambre, qui menait aux couloirs de la grotte.

« - Tu penses qu'il va revenir nous chercher ? »

Elle allait abaisser le levier, quand soudain, des bruits de pas dans son dos résonnèrent. Sa main appuya alors, mais, comme pour la roue, le mécanisme semblait grippé, et elle n'avait pas forcé assez pour réussir à ouvrir la porte. Mais c'était trop tard, et le garde qui courrait comme un fou pour la rattraper était déjà derrière elle. L'adrénaline courrait dans ses veines, menaçait de faire exploser son coeur, de faire griller son cerveau et exploser ses poumons, mais la brune ne s'était jamais sentie si vivante. Après tout ce qu'ils avaient traversé, elle se sentait enfin vivante. Après avoir vu la mort en face, après avoir appelé elle-même la Faucheuse pour qu'elle vienne attraper des centaines de Terriens, Billie s'était sentie avec un énorme poids sur le coeur et dans le ventre. Mais là, cette course folle et cet adrénaline qui courrait dans ses veines l'empêchait de penser. Elle l'empêchait de penser qu'elle avait massacrer tant de personne, elle l'empêchait de penser que John était mort, elle l'empêchait de penser que John était mort à cause d'elle.
Et ce n'est que quand elle sentit le canon de l'arme frôler ses cheveux qu'elle prit conscience de sa poitrine qui se soulevait bien trop rapidement, de son coeur qui menaçait d'imploser, et des larmes qui n'étaient qu'à deux doigts de s'écraser sur ses joues rosies par sa course. Pourquoi ? Un ras-le-bol, peut-être. Le chagrin de la perte de John, certainement. Le fait de réaliser qu'elle était seule, ou presque, maintenant.

« S'il vous plait, lâchez ce levier, il en va de notre survie. »

Notre survie. Si elle ouvrait cette porte, ils mourraient ? Mais comment ... Les radiations. Voilà pourquoi ils étaient restés sous terre pendant si longtemps. Voilà pourquoi ils avaient besoin de ces combinaisons. Voilà. Tout s'expliquait. Si elle ouvrait cette porte, elle ferait entrer tout un tas de radiations dans le Mont Weather, et tous ceux qui se trouverait dans ce niveau mourraient. Mais Billie avait déjà tué trop de monde. Elle, la gentille fille, celle qui ne ferait pas de mal à une mouche, avait déjà trop de sang sur les mains. Si John avait encore été là, peut-être qu'elle se serait alors à ce moment effondrée en larmes. De culpabilité, de regret, de tristesse. Mais l'âme surtout rongée par la culpabilité, comme si tout son être était plongé petit à petit dans le plus corrosif des acides et qu'à chaque seconde de chaque minute de chaque heure de chaque jour, elle en subissait l'affreuse douleur. Mais John n'était plus là, et désormais, son peuple comptait sur elle. Les autres n'avaient plus qu'elle. Elle cligna donc, et ce bref mouvement des paupières chassa les larmes qui étaient venues perler sur ses cils, avant de lever les mains bien en évidence. Puis, la tête haute et le regard perdu au loin, elle se tourna vers les trois gardes qui se tenaient devant elle, et qui la tenait en jour comme si elle était une dangereuse criminelle.

Mais cette idiote ne bougeait pas. Voulait-elle donc le forcer à appuyer sur la gâchette ? Car il en était plus que capable, cela était certain. A quoi réfléchissait-elle donc, cette petite insolente et surtout, insouciante ? Peut être voulait-elle tous les tuer après tout ! Et si c'était cela ? Si elle attendait pour pouvoir d'un coup tirer sur le levier ? Il lui exploserait le crâne sans hésitations.

« - Les mains sur la tête ! »

Et finalement, elle obtempéra. Ses mains se levèrent pour aller se poser derrière son crâne, tandis qu'elle se retournait lentement, le regard vitreux. Mais qu'avait donc cette fille ? ne put s'empêcher de penser l'homme. Était-elle folle à lier ? Il s'empressa de passer derrière elle, la tenant toujours en joue malgré le fait qu'il doute qu'elle soit assez bête pour courir et se faire tuer.

« Amenez la à Wallace, et des qu'ils auront fini, ramenez la au dortoir avec les autes. »

Les trois autres hochèrent la tête et indiquèrent la direction a Billie, avant rapidement dans les couloirs en direction du bureau du président. Tandis que l'homme lui, partait dans une direction toute différente.

Le brun la regarda qui lorgnait tour à tour sur son assiette et sur lui, comme si elle le poussait à finir son assiette. Mais bien malheureusement, Jack s'était déjà levé, et il faisait son petit numéro à Adèle. Lui, la reluquer ? Allons, il n'allait pas s'en priver, tout de même ! Il ne fallait pas oublier qu'il avait face à lui Adèle et que reluquer la demoiselle n'était pas choses aisée étant donné qu'elle avait souvent l'air d'une badass, dure à cuir. Alors non, il n'allait pas se gêner. Et puis ils s'étaient embrassés, aussi, songea-t-il avec un sourire amusé, tandis que ses pensées le faisait rire. Même intérieurement, il arrivait à se faire des blagues à lui même. Il était doué, tout de même. Bon, on pouvait peut-être mettre ça sur le compte de la nervosité et de tout ce qu'ils avaient vécu. Un moyen comme un autre de ne plus y penser, certainement.

« - Comment ça, tu ne peux pas en dire autant du papi ? Mate un peu ça, Mamie ! » dit-il en contractant ses abdos, tout en revenant vers elle, le bâton tendu vers Adèle.

Entre eux, que de jeux, pour le moment, mais le brun n'avait pas l'intention de jouer avec elle ou quoi que ce soit, et il posa une main sur son bras quand elle s'appuya sir le bâton. Ce serait dommage qu'elle tombe, tout de même, et qu'elle se brise quelque chose. Ils étaient déjà assez cassés comme ça pour qu'il doivent en plus la porter pour avancer. Le jeune homme regarda alors la porte de la grotte - chambre ? - et haussa les épaules.

« - Aucune idée ... »

Puis, il lui jeta un regard amusé, avant de se tourner de nouveau vers la grotte. Et il cria, tout simplement.

« - Hé ! Pour se laver, on fait comment ? »

On la menotta, mais elle ne cilla pas et se laissa faire, sans bouger, sans ruer. Le regard porté au loin, elle ne frissonna pas quand on lui passa les menottes aux poignets, et quand on la poussa pour la faire avancer, sans ménagements, elle ne résista pas. Après tout, elle l'avait bien cherché. Ainsi, tandis qu'on la conduisait à Wallace dans les couloirs du Mont Weather, Billie ne voulait penser à rien. Ni à ce qu'elle venait de faire, ni à ce qui lui arriverait, ni à ce qui arriverait aux autres. Ni à ce qu'elle avait commis, ni à ceux qu'elle avait tué.
C'est donc imperturbable, la tête haute et une lueur de dureté inhabituelle dans le regard, que Billie fut escortée. D'ailleurs, que se passerait-il ? Allait-on la mettre en prison ? On allait l'enfermer, à coup sûr, ou peut-être la laisserait-on partir. Non, évidemment que non. Sinon ils ne se donneraient pas tant de mal pour les attirer, pour leur donner envie de rester. Non, ils allaient forcément l'enfermer. Ou bien la tuer, qui sait. Il fallait qu'elle réfléchisse, qu'elle se torde les méninges, parce que si elle mourrait, alors les autres seraient livrés à eux-même. Et comme John l'avait dit, Billie était leur chef. Mais un chef n'abandonnait pas son peuple, et elle ne comptait pas le faire.
Mais ce que venait de dire le garde lui revint en mémoire.

« Des qu'ils auront fini, ramenez la au dortoir avec les autres. »

Cela signifiait-il qu'on ne l’enfermerait pas ? Qu'on la laisserait libre de ses mouvements, qu'on la laisserait avec les autres ? Car c'était tout ce qu'elle demandait. Simplement plus de temps pour pouvoir mener son plan à bien, simplement plus de temps pour assimiler le plan complexe de cet endroit, simplement plus de temps. Mais déjà, elle arrivait dans le bureau de Wallace, et le cours de ses pensées fut interrompu. Les gardes s'éloignèrent d'elle, se mirent au garde à vous, et leur regard vint se perdre au loin. La brune revint alors sur le vieillard, et elle le fixa des yeux un instant. Chef à chef. Leader à leader. Ancêtre contre gamine. Mais tous les deux visant le même but : le bien être des leurs.

Hm. Elle avait légèrement plissé les yeux, peu convaincue par le fait qu'il ne soit pas en train de la reluquer. Car il était bel et bien en train de le faire, et elle sentait son regard brun se poser sur elle sans qu'elle n'ai eu le temps de lui donner son avis. Et de toute façon, elle n'avait pas vraiment le choix, quoique l'assommer avec le bâton sont ils etaient en possession serait peut être suffisant. Mais la brune n'allait pas pousser le vice jusque la, surtout qu'elle ne voulait pas plus le blesser que ce qu'il ne l'était deja. Elle croisa donc innocemment ses bras sous sa poitrine, levant légèrement les yeux au ciel avant de lâcher un autre léger rire en le regardant.

« - Tu devrais te lancer dans une carrière de Stripteaseur, tu ferais un tabac chez les mamies » raillait-elle avant d'attraper le bâton pour de bon.

Elle le regarda se diriger vers l'entrée de la grotte et plissa légèrement les sourcils. Il comptait faire quoi au juste, aller chercher le sauvage ? Mais non, il fit bien mieux. C'est à dire hurler dans les dédales de la grotte pour l'appeler.
La petite resta légèrement perplexe, toujours appuyée sur sa canne, lorsque les pas résonnèrent à nouveau et que le Terrien apparu près d'eux. Lorsqu'il remarqua qu'Adele était debout à côté de Jack, il leva les yeux au ciel, presque exaspéré, du moins, c'était ce qu'elle semblait voir. Par quoi était-il donc agacé ?

« - Suivez moi » se contenta-t-il de répondre.

Et sur ce, il se retourna pour commencer a se diriger vers le couloir. La jeune femme jeta un regard a Jack avant de suivre l'homme, toujours armée de sa canne sur mesure. Ou les emmentait-il ? Ils tournèrent plusieurs fois, et fatiguée comme elle l'était, elle n'arrivait pas a retenir le trajet. C'était étrange, elle avait l'impression d'entendre de l'eau ciouler. Y avait-il une source ici ?

Apparemment, elle avait remarqué qu'il la reluquait sans aucun soucis, comme en témoignaient les petits regards un brin agacés qu'elle lui lançaient. Mais Jack n'allait quand même pas s'arrêter pour si peu, et, avant de crier, il lui fit un grand sourire avant de se baisser pour venir déposer un baiser sur son front.

« - Bonne idée, Doyenne ! » fit-il donc avant de se retourner.

Et il avait vu juste, car quelques secondes après qu'il ait littéralement gueulé, le Sauvage arriva, leur intimant de le suivre, après leur avoir lancé un regard exaspéré. Quoi ? Ils n'avaient pas le droit de se lever, maintenant ? Le jeune homme soupira avant d'emboîter le pas à son amie dans le dédale de couloirs de cette grotte qui était plus grande qu'elle n'y paraissait. Et soudain, il entendit un bruit, un léger glougloutement. Une source ? C'était ça, sa douche ? Eh beh .. Ca allait être rafraîchissant, songea le brun au moment même où le sauvage s'arrêtait pour les laisser entrer dans une petite cavité, légèrement sombre, qui recelait un grand bassin d'eau naturelle, alimenté par ue petite source qui émanait du fond de la paroi.

« - C'est une source chaude naturelle, elle remonte des profondeurs de la terre, d'où elle tire sa chaleur. Vous pouvez vous laver, maintenant. »

Puis, sans un mot de plus, il s'en alla. Avec un grand sourire, Jack se tourna alors vers Adèle. Pourquoi tant de conneries ? Pour oublier son visage monstrueux, la jambe de la brune. Pour oublier que c'était de sa faute.

« - Tu vas peut-être l'avoir, ton numéro de treaptease, Mamie ! »

Et il se dirigea vers le bassin.

Le bureau du président etait clos, mais il etait pourtant visible, puisque les baies vitrées transparentes servaient en fait de portes. A vrai dire, il peignait. Assis sur un petit tabouret en face de son chevalet, l'homme peignait, tout simplement. Et pourtant, ce qu'il dessinait n'était pas anodin. Il peignait l'extérieur, fleurit et verdoyant, avec un ciel rempli de nuages blancs qui s'y repensaient comme des petits bouts de cotons.
Le vieille homme se retourna des qu'il entendit les gardes et lâcha un petit soupir en voyant Billie.

« - Entrez Billie, je vous en prie »

Les gardes poussèrent légèrement la jeune femme dans le bureau, refermant derrière elle, laissant le chef tête a tête avec l'insolente. Il lâcha son pinceau et se leva lentement, se rapprochant de Billie, un petit air inquiet plaqué sur le visage.

« - Écoutez ... Je ne sais pas ce que vous cherchez à fuir, ou à vous prouver, mais vous ne devez pas agir comme bon vous semble ici. Vous avez faillit tuer presque toute notre population aujourd'hui. Vous rendez-vous compte de l'erreur que vous aurez pu faire ?

Wallace s'arrêta quelques instants avant de reprendre, désignant d'un geste flou sa peinture qui trônait sur son chevalet.

« - Si nous vivons ici depuis des années, c'est parce que nous ne sommes pas assez évolues pour résister aux radiations. Ne serait-ce qu'un pas dehors nous désintègrerait sur le champ, et il est pour cela quasiment impossible pour nous d'aller dehors. Le systeme que nous avons mis en place pour nous protéger a faillit échouer aujourd'hui, et j'aimerai avoir votre promesse sur le fait que vous ne recommencerez plus jamais ca. »

Billie avait observé les peintures de l'homme, et elle s'était brièvement demandé comment il pouvait peindre un tel paysage s'il n'était jamais allé dehors. Mais, sans l'interrompre, sans lui poser de questions, elle le laissa parler, étendre ce qu'il avait àdire, ce qu'il voulait qu'elle sache. Allait-il la mettre en prison ? L'enfermer comme elle l'vait été durant deux années ? Etait-ce qu'ul allait faire ? Elle ne le voulait pas. Mais elle ne voulait pas qu'il n'arrive quoi que ce soit à ses amis, et elle ferait tout pour que ce ne soit pas le cas.

« - Certains de mes amis ne sont pas ici. Ils sont certainement encire dehors, peut-être blessés. Les avez-vous trouvé ? »

Elle ne donna pas de promesse. PAs encore, pas si elle ne pouvait la tenir. Car pour le moment, rien ne lui disait qu'ils étaent en sécurité ici, et ce, m^mee si tous les autres semblaient le croire. Mais tout était bien trop beau, trop facile ... Ils ne se trouvaient pas dans un conte de fée, bon sang, tout cela était impossible !

La jeune femme décroisa ses bras en levant les yeux au ciel lorsqu'il l'affubla d'un autre stupide surnom, mais elle ne put pas retenir un sourire, surtout lorsqu'il l'embrassa sur le front comme si elle etait une enfant.
Mais deja, ils avançaient dans les dédales de la grotte et finalement, ils arrivèrent dans une autre petite cavité. Et c'était bien ce qu'elle avait pensé : une source ! Mais ils allaient geler avant même d'entrer dans l'eau glaciale ! C'est alors qu'il leur expliqua que celle-ci etait chaude en raison du fait qu'elle remontait des profondeurs. Et sans attendre, il s'en alla une fois de plus, les laissant seuls.
La jeune femme lâcha un petit sourire face à la remarque de Jack, se dirigeant vers la source a ses côtés.

« - Mamie a hâte d'assister au spectacle ! » dit-elle en riant.

En tout cas lui, pouvait toujours rêver pour que l'inverse se produise. La jeune femme lui jeta un petit regard entendu avant de s'approcher du bassin, s'asseyant sur le sol avant de se glisser jusqu'à bord, touchant l'eau du bout des doigts.

« - Il n'a pas menti, c'est bien chaud. »

Elle se decala légèrement sur le coté, avançant sa jambe encore en forme dans l'eau et tirant l'autre a l'intérieur du bassin et resta ainsi, les mollets a moitié dans l'eau.

Mais bien évidemment, Jack n'allait pas se foutre à poil, et ce, même s'ils étaient la semi-obscurité. Non, ils ne se connaissaient pas encore assez pour cela, songea-t-il avec un sourire. Lentement, il la rejoignit donc, qui s'était assise sur le bord, et il se laissa glisser au sol à côté d'elle, tandis que ses pieds entrèrent dans l'eau agréablement chaude. Oh, que ça faisait du bien .. Il soupira alors et se tourna vers elle.

« - Tout travail mérite salaire ... » fit-il en sautant doucement dans l'eau chaude.

Mais elle était bonne, cette eau .. Et certainement légèrement salée, car lui qui n'avait jamais nagé arrivait parfaitement à flotter. Il enfonça donc sa tête sous l'eau en inspirant, et resta ainsi quelques secondes, savourant la pression de l'eau chaude sur sa peau meutrie. Mais il n'osait pas se frotter, car même si la présence des cataplasmes sur son corps n'était pas très agréable, il redoutait plus encore la douleur du contact de ses mains avec sa peau brûlée.
Il finit cependant par ressortir la tête de l'eau, et, durant un instant, il avait presque oublié son visage déformé, et tout ce qui allait avec. Un sourire sur les lèvres, il s'approcha donc de la brune et posa ses coudes sur ses cuisses à elle en levant la tête vers son visage, notant que, pour une fois, c'était elle qui était plus grande que lui. Mais ça ne durerait pas longtemps, songea-t-il avec un sourire dans le regard.

« - Tu viens ? Elle est bonne. »

Le président Wallace lâcha un sourire en remarquant qu'elle n'avait pas repondu a sa demande, mais il ne releva pas, se retournant au cnotaire vers la brune qui semblait si déterminée.

« - Pour l'instant, les équipes de sortie n'ont trouvé aucun jeune a l'extérieur. Mais nous continuons nos recherches, et je promets de vous informer si quoique ce soit se produit en ce qui conerne les vôtres. »

Il soupira avant de faire lentement le tour de son bureau, posant ses deux mains à plat sur le bois et se penchant légèrement en avant pour observer la jeune femme. Elle semblait meme plus que déterminée, et il ne fallait pas qu'il oublie le fait qu'elle soit une menace potentielle, bien malgré le fait qu'il préférait plutôt penser qu'un accord serait facilement faisable. Du moins l'espérait-il ...

« - Vous pouvez disposer, mes hommes vont emmèneront au dortoir. Si vous avez besoin de quelque chose, il suffit de le demander. Évitez juste de faire n'importe quoi.» finit-il dans un sourire.

Billie le fixa un instant. Aucun jeune de trouvé. Mais comment était-ce possible ? Où était donc passé la dizaine de jeunes qu'il manquait ? Ils ne pouvaient pas avoir disparus, tout de même ! Et puis ils avaient survécu à l'attaque des Terriens, donc à moins d'être tombés dans une embuscade, ils ne pouvaient pas être morts ..
A vrai dire, cela laissait la petite brune perplexe, et elle attendit deux secondes avant de répondre, en croisant les bras, qu'on lui avait libéré, sur sa poitrine.

« - Alors laissez-moi y aller. Je suis immunisée contre les radiations et je suis plus que déterminée à les retrouver, je ... »

Mais avant même qu'elle n'ait terminé, il la coupa et lui dit qu'elle pouvait disposer. Il ne la laisserait pas sortir. Il ne la laisserait pas aller voir par elle-même. Il ne voulait pas qu'elle sorte. Qu'ils sortent, réalisa-t-elle. Il y avait bien anguille sous roche. Il y avait un soucis quelque part, quelque chose clochait . Et elle avait bien l'intention de découvrir ce secret qu'ils gardaient bien cachés.
Aussi, avec un sourire de circonstance, elle hocha la tête.

« - Pas de soucis, Monsieur. »

Elle se tourna alors et sortit du bureau orné de nombreux tableaux, mais à peine fit-elle trois pas que deux gardes l'encadrèrent de nouveau. Eh bien, ça devenait son lot quotidien. Elle allait devoir courber le dos quelques temps, si elle voulait réussir à arriver à quelque chose, parce qu'avec ces chiens de gardes sur le dos, elle n'arriverait à rien.

Adèle le regarda se glisser dans l'eau en souriant, tandis qu'elle agitait doucement celle-ci avec sa jambe valide.
Elle ne répondit pas à sa petite plaisanterie, se contentant plutôt de le regarder s'amuser dans l'eau, flottant parfois, ou se glissant sous celle-ci. Lorsqu'il remonta après quelques secondes d’apnée sous l'eau, un petit sourire vint naître sur les lèvres de la brune. Les cheveux collés ainsi plaqués sur son crâne, Jack ressemblait à un ado en recherche de soi même.

« - Qu'est-ce que tu es beau ! » fit-elle ironiquement.

Puis il se rapprocha doucement d'elle, posant ses coudes sur ses cuisses à elle, encore assise sur le bord de la roche. Venir dans l'eau ? Bien sûr que oui, elle en rêvait. Elle avait juste envie de se laisser sombrer au fond de celle-ci sans plus penser à rien, de se sentir au chaud, englobée dans ce liquide transparent.

« - J'arrive tout de suite. »

Et sur ce, la jeune femme se servit de lui pour descendre, s'appuyant sur ses épaules pour entrer doucement dans le bassin. Certes sa descente ne fut pas de toute élégance et relevait plutôt d'une démarche pachydermique, presque collée à lui. Mais une fois ses pieds touchant le sol, Adèle se détacha du jeune homme.
Soudain, elle se sentit beaucoup mieux. Avec les propriétés étonnantes de l'eau, le poids de sa jambe n'importait plus, et elle tenait parfaitement debout, sans forcer. Ce qui lui arracha un grand sourire. Elle fit glisser l'eau entre ses doigts et s'en jeta un peu sur le visage, attendant un peu pour s'enfoncer sous la surface.

Jack pencha un peu la tête sur le côté et ferma les yeux en haussant les épaules, feignant l'humilité, tandis qu'un sourire naissait dans sa gorge, dans la réponse qu'il s'apprêtait à lui donner.

« - Que veux-tu ? »

Puis il rouvrit les yeux et la regarda, tandis qu'elle posait ses mains sur ses épaules à lui pour descendre. D'ailleurs, il posa ses propres mains sur la taille de la jeune femme, avant de la laisser découvrir les propriétés étonnantes de l'eau. Ainsi, en restant sur le bord, il la regarda se mouvoir dans l'onde avec une facilité déconcertante, comme si elle avait fait ça toute sa vie, comme si elle était faite pour ça. L'eau ruisselait doucement de ses mèches les plus longues, qui traînaient dans l'eau, et elle gouttait doucement sur sa peau pâle, alors m^me qu'un grand sourire apparaissait sur ses lèvres. De tels sourires, il lui en avait rarement vu, il devait bien l'avouer. Mais s'il ne fallait qu'une source d'eau chaude pour la faire rayonner ... Bon d'accord, encore fallait-il en trouver une, mais tout de même. Ce n'était pas non plus quelque chose d'infaisable.
Le brun resta donc là, dans la semi-obsurité, à l'observer en silence, sans plus penser à tout le malheur qui leur était arrivé, sans plus se poser vingt mille questions, sans plus rien penser si ce n'est elle, juste devant lui.

Wallace lui adressa un sourire alors qu'elle sortait de son bureau, et dès qu'elle fut assez loin, entourée des gardes, le vieillard retourna à sa peinture, rajoutant quelques tâches de couleur dans les arbres.
Les gardes eux, continuèrent d'avancer, encadrant Billie. Même si le président semblait lui faire confiance, il fallait la surveiller de très près. Et c'est ce qu'ils ferraient. Ainsi descendirent-ils plusieurs étages, pour finalement s'arrêter quelques niveaux en dessous du bureau de Wallace. Ils traversèrent de nombreux couloirs, et au dernier tournant, on entendait déjà la voix des jeunes qui s'élevait.
Ils conduisirent Billie jusqu'aux portes du dortoir et l'y laissèrent, partant se reposter plus loin. A l'intérieur se trouvaient tous les jeunes, allongés sur les lits, ayant déjà colonisé l'endroit. De nombreux rires se firent entendre, et des exclamations de plaisir lorsqu'ils se jetaient sur les lits, heureux de pouvoir enfin dormir sur quelque chose de convenable.

« - Billie ! T'étais passée où ? » demanda la petite Charlotte.

Une petite main vint soudain chercher la sienne, et Billie baissa la tête vers Charlotte, dont le ton inquiet reflétait l'inquiétude. D'ailleurs, aussitôt que la voix de la fillette s'était élevée, tous s'étaient rapprochés pour entendre ce qu'elle avait à leur dire. Et voir leur mine inquiète lui fit plaisir, mais aussi peur. Car si jamais il lui arrivait quelque chose, quiles guiderait ? Qui prendrait la relève ? La brune pinça un instant les lèvres, quand elle aperçut derrière les autres Andrew et Shobbian, qui s'approchaient à leur tour. Elle leur adressa un regard, avant de sourire aux autres. Les rassurer, mais sans leur mentir évidemment. Elle ne leur dirait pas tout, simplement, et ne raconterait ce qui s'était passé qu'à Andrew et Shobbian.

« - J'étais partie faire un tour. ces messieurs m'ont gentiment escortée ici. » fit-elle en désignant les gardes, qui lui jetèrent un regard perplexe.

Mais elle se contenta de leur adresser un grand sourire, avant de revenir vers les siens. Ils importaient le plus, et ils étaient ceux pour qui elle allait se battre, coûte que coûte.

Toujours dans l'eau, la jeune femme ne releva pas la plaisanterie du jeune, se contentant de lui offrit simplement le sourire qui coulait sur ses lèvres depuis qu'elle était dans le bassin, faisant lentement glisser l'eau sur sa peau blanchâtre, parsemée de brûlures sur le flanc gauche. La jeune femme prit une grande inspiration avant de s'enfoncer sous l'eau, ne laissant de traces de son passage que quelques bulles. Une fois totalement recouverte du précieux liquide, ne laissant aucune parcelle de sa peau, ou de ses cheveux remonter à la surface, Adèle eut l'étrange impression de se sentir bien. Plus encore, beaucoup mieux. C'était comme si être enfermée dans cette eau chaude envoyait valser toutes les inquiétudes qu'elle avait éprouvé jusque là, comme si tout était effacé.
Lorsqu'elle remonta à la surface, la brune remarqua que Jack n'avait pas bougé, restant muet, prêt du bord. Que regardait-il donc comme ça ? Rassemblant ses cheveux d'un seul côté de sa tête, la jeune femme avança doucement dans l'eau pour se retrouver au niveau du jeune homme, penchant légèrement la tête sur le côté.

« - Est-ce que tout va bien ? »

En prononçant ces mots, la jeune femme avait légèrement froncé les sourcils. Il avait l'air perdu dans ses pensées, elle espérait seulement qu'il ne ressasse pas encore sa prétendue faute sur tout ce qu'il s'était passé.

La petite Charlotte garda encore quelques instants la main de Billie dans la sienne, avant que celle-ci ne la lâche pour désigner les gardes. Billie s'était-elle perdue dans les couloirs, et les hommes l'avaient-ils ramenée ?
Derrière les autres, Andrew et Shobbian regardaient la brune avec une certaine perplexité. Quelque chose n'allait pas, cela se voyait tout de suite. Andrew laissa échapper un bâillement et se retourna vers la blonde qui l'accompagnait, et tous les deux se dirigèrent vers leur chef. Dès lors, tout le monde retourna à ses petits activités, les uns s'allongeant sur les lits, exténues, et les autres s'asseyant plutôt pour discuter avant d'aller dormir.

« - Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
- Qu'est-ce que tu faisais pour que des gardes t'aient ramenée jusqu'ici Billie ? »

Les deux jeunes avaient tous les deux croisés leurs bras, le regard rivé sur Billie. Avait-elle découvert quelque chose de mauvais ici, alors que tout semblait leur prédire un avenir heureux, avec les habitants du Month Weather ?

1302 posts, quand même ~

Oui, Jack était resté immobile. Pendant tout le temps de la petite danse aquatique de la jeune femme, il n'avait pas bougé, ne s'était pas déplacé, n'avait pas profité de l'agréable contact de l'eau sur son corps. Il avait simplement, oui, simplement, regardé Adèle découvrir les joies de l'eau, tout comme lui les avait découvertes quelques temps avant elle. Mais si lui avait apprécié la légère pression du poids de l'eau sur sa peau, la douce chaleur que l'onde répandait sur sa peau, pour Adèle, être immergée signifiait bien plus, et le brun venait de s'en rendre compte. Ici, sa jambe ne devait plus la faire souffrir. Ici, elle ne devait plus forcer pour tenir debout, pour avancer, pour faire un pas devant l'autre. Ici, elle était enfin redevenue celle qu'elle était avant, celle qui avait besoin de ses jambes, autant que tous ici bas en avaient besoin pour survivre.
Mais si elle ressentait cela avec autant de puissance, si l'eau était pour elle miraculeuse, c'était à cause de lui, parce qu'à cause de ses choix, elle avait la jambe abîmée, peut-être pour toujours. Lui était défiguré, mais savoir qu'à cause de lui, elle ne pourrait peut-être plus marcher était un poids horrible à porter.
Ainsi, quand elle s'approcha en rassemblant tous ses cheveux d'un seul côté, le jeune homme ne bougea toujours pas, la regardant simplement s'approcher. Puis il hocha la tête en haussant imperceptiblement les épaules.

« - Oui, tout va bien. »

Un petit mensonge de temps en temps ne faisait jamais de mal, pas vrai ? Et puis il ne fallait pas qu'elle s'inquiète à son sujet, car c'était lui qui s'inquiétait pour elle à cet instant, se demandant si un jour elle pourrait remarcher normalement. Il espérait sincèrement que oui, pour elle, mais aussi peut-être pour la culpabilité qui lui rongeait l'esprit.

J'avais même pas vu ~

Adèle, la tête toujours penchée sur le côté, s'amusait nerveusement avec ses cheveux mouillés, le regard relevé vers Jack. La jeune femme aurait bien aimé savoir à quoi il pensait en ce moment même, alors qu'il la regardait sans réellement la voir. Elle pouvoir l'apercevoir dans son regard : il était totalement perdu. Dans ses pensées, ou bien dans son être ? Était-il encore en train de ruminer ses stupides pensées ? Elle refusait clairement de le voir dans cet état, surtout si c'était à cause d'elle. Ils devaient arrêter de souffrir l'un à cause de l'autre, elle ne supportait plus ça. Surtout que désormais, ils étaient seuls ici, et s'il fallait y rester, autant qu'ils ne se cachent pas des choses. Parce qu'elle ne le supporterait pas.

« - Tu es sûr ? » fit-elle, les doigts toujours entremêlés dans ses cheveux.

Elle resta encore quelques instants face à lui avant de pivoter légèrement, gardant toujours ses cheveux rassemblés du même côté. Ses yeux se posèrent sur Jack quelques instants, et elle lui désigna du regard l'étrange baume et les feuilles qui recouvraient encore sa peau brûlée. Le Terrien leur avait clairement dit qu'ils pouvaient les enlever, seulement, elle n'était pas assez souple et surtout, elle risquait de rouvrir la peau refermée en essayant de se torde pour les retirer.

« - Est-ce que tu peux m'aider ? »

La brune s'était légèrement retournée vers lui, du moins elle avait tourné sa tête pour le regarder dans les yeux, lui offrant un petit sourire tandis que quelques gouttes d'eau venaient encore perler sur son visage pâle.

Comment on est trop des belles gosses ~ XD

Jack l'observa jouer avec ses mèches mouillées, et une ombre de sourire vint étire le
coin droit de ses lèvres, tandis qu'elle l'observait du regard. Mais que voyait-elle, quand elle le regardait ? Voyait-elle à quel point il était paumé ? A quel point il s'en voulait aussi ? Ou alors ne voyait-elle que ses traits défigurés, qui gâchaient la moitié de son visage qu'elle connaissait pourtant si bien ? Arrivait-elle-même à le reconnaître, sous ses cicatrices et ces cataplasmes ? Encore une fois, le brun se posait des questions. Encore et toujours des questions. Et, quelque part, il en avait assez. Ce qu'il voulait, pour le moment, c'était juste se poser, arrêter d'entendre ces satanées questions qui tournaient en boucle dans sa tête comme un disque dur rayé, et simplement dormir pour se réveiller plus tard, quand tout serait passé, quand les questions n'auraient plus lieu d'être. Mais bien évidemment, ça, c'était impossible. On n'était pas dans un film de science-fiction, tout de même !
Ainsi, il la regarda faire, entremêler ses doigts dans ses cheveux bruns, avant qu'elle ne se tourne pour lui demander de retirer les feuilles et les cataplasmes. Et, sciemment, il n'avait pas répondu à sa première question. Il ne voulait pas qu'elle le regarde quand il lui répondrait, car il savait, au fond de lui, qu'il devait passer à autre chose puisque, non, il ne recouvrerait pas son ancienne peau et que non, elle ne retrouverait certainement pas sa mobilité d'antan. Alors il fallait tout simplement passer à autre chose, oublier le passé, aller de l'avant. Mais pour le moment, c'était encore difficile pour lui.
Alors il posa simplement ses mains sur la peau rougie de la brune et hocha la tête, au moment où elle plantait son regard dans le sien.

« - Aucun problème. Mais qu'est-ce que tu ferais pas pour sentir mes mains sur ton corps, quand même. » ajouta-t-il dans un fin sourire.

Puis, il commença, doucement, à retirer cette seconde peau verdâtre. Avec des gestes doux et précis, il ôta les feuilles, qu'il déposa sur le bord du bassin, avant de prendre de l'eau en coupe dans ses mains et de la laisser couleur doucement sur la peau brûlée, évitant au maximum de frotter avec ses paumes, car il savait à quel point c'était douloureux. Le silence dura ainsi plusieurs minutes, avant que Jack ne se décide enfin à parler.

« - Je n'aurais pas dû te dire de te précipiter vers le camp ... » finit-il pas souffler, alors qu'on aurait pu penser que le silence allait se prolonger ainsi indéfiniment.